Si j’ai intitulé cet article du titre du livre de Thomas d’Ansembourg, c’est que la confusion entre gentil et vrai dépeint parfaitement l’attitude qu’adopte la femme yoyo dans de nombreuses situations.
Elle a tellement peur de déplaire que bien souvent, elle s’entend dire “oui” alors qu’elle pense “non”. Elle éprouve alors un sentiment d’imposture, comme si elle n’était pas elle-même. Comme si elle n’était pas vraie…
La parole peut être porteuse de violence
Mais cette attitude n’est pas sans conséquence car à force d’être gentil, nous risquons de devenir violent. Si l’on n’ose dire, exprimer son désaccord, sa tristesse, sa colère, à la longue les frustrations s’accumulent. La pression interne s’intensifie et la moindre petite contrariété suffira à provoquer l’explosion.
A vouloir éviter le conflit ou le désaccord, on aggrave la situation. Cette accumulation de petites ou de grandes frustrations résulte d’une inhibition qui devient toxique à la longue. Ses conséquences peuvent aussi bien mettre à mal le rapport à l’autre que la relation à soi. Dire“oui-oui” et penser “non” est coûteux émotionnellement. Une facture qui doit, à un moment ou l’autre, être acquittée. D’abord on le paye soi-même, en étant en souffrance, puis on le fait payer à l’autre par la tension ou l’énervement qu’on lui transmettra tôt ou tard.
On distingue toutefois des différences entre les hommes et les femmes. Les hommes vont passer de l’inhibition à l’explosion alors que les femmes, plus endurantes, laissent la phase d’inhibition durer plus longtemps jusqu’à l’implosion. Dans ce cas, la violence est retournée contre soi.
Comme en ce qui concerne la femme yoyo, combien de fois s’est-elle tournée vers la nourriture pour étouffer ce qu’elle n’arrivait pas à libérer avec les mots…
Mais arrive un moment où les femmes aussi explosent. L’une des causes de ces conditionnements est que l’on ne sait pas communiquer. Se taire ou dire ses quatre vérités à l’autre, est-ce vraiment productif ? Se sentant jugé, agressé voire insulté l’autre va soit se refermer et il n’est alors plus dans la communication ; soit il va, en retour, être également dans le jugement et l’agressivité.
Qu’est-ce que la communication non violente (CNV)?
La communication non violente part du principe que la parole peut désamorcer toute situation qui pourrait déboucher sur un conflit. A condition de pas être dans le jugement, au lieu de dire “tu es égoïste, tu ne penses qu’à toi quand tu dis… ou tu fais…”, il serait plutôt préférable de parler en son nom et de faire part de son propre ressenti. “Quand tu fais…ou dis… Ça me rend triste, je me sens seule et malheureuse. J’ai besoin de sentir que je compte pour toi, que tu me rassures. Et j’aimerai que l’on en parle calmement toi et moi”.
Le propos est alors clair, affirmatif mais sans être agressif, il n’y a pas de jugement de l’autre. On énonce un fait, on décrit l’attitude de l’autre ou son propos puis on évoque ce que cela provoque en soi. On n’est pas dans l’accusation, mais dans l’observation de la situation et la description de son propre ressenti. Et le plus important est que l’on parle en son nom, on arrive à dire “je”.
Pour bien communiquer, il faut savoir écouter !
Afin de pouvoir affirmer ses choix, ses pensées, donner son avis, il est nécessaire, au préalable, de s’écouter ! Écouter l’autre, mais aussi s’écouter soi-même. D’ailleurs on ne peut correctement écouter et comprendre l’autre si l’on ne s’écoute pas et on ne se comprend pas soi-même.
La CNV est une réforme du langage, de la pensée, mais aussi du rapport à l’autre et de la relation à soi. Le respect de l’autre exige que l’on se respecte d’abord soi-même. Sinon il y a confusion entre soi et l’autre, les limites ne sont pas posées, il est alors difficile de s’affirmer, d’être soi. Pour être vrai, il faut donc nécessairement s’écouter, s’accepter et se respecter tel que l’on est. On est alors capable d’être vrai dans ce que l’on vit, de dire “non” sans être agressif, de ressentir ses propres besoins et de pouvoir les exprimer à l’autre de manière à ce qu’il les respecte. Il s’agit alors d’un cercle vertueux, car la confiance et l’estime de soi augmentent grâce au respect que l’on a pour soi mais aussi pour l’autre.
Attention à la pensée binaire !
Ce n’est pas parce que l’on revendique ses propres choix, que l’on ose s’affirmer et dire “non” que forcément on va négliger l’autre. Le piège serait aussi de ressentir de la culpabilité si l’on s’affirme et de la colère si l’on est trop souple et dans la soumission.
Dans la négociation et le compromis, les deux parties peuvent trouver satisfaction. On peut être à l’écoute de l’autre mais aussi se respecter soi-même. Les deux points de vue sont alors mis en parallèle dans une continuité et non dans une opposition. Il s’agit en quelque sorte d’adopter une certaine fermeté dans la pose de limites mais de faire preuve aussi de souplesse dans le jeu avec les curseurs du compromis, c’est tout l’art de la négociation…
La colère peut être constructive
La colère est une émotion jugée socialement négative, alors qu’elle est l’indicateur d’un état intérieur qui n’est pas écouté. Comme si l’être humain pouvait en permanence ne ressentir uniquement que de la joie, du bien-être, de la confiance sans rencontrer le doute, l’angoisse, la tristesse ou la colère… Les deux tendances font parties de la vie !
Le défit serait plutôt de pouvoir exprimer sa colère d’une manière respectueuse afin d’être entendu par l’autre. Sans refouler cette colère ou la laisser exploser brutalement, ce qui serait, bien évidemment, tout aussi contre-productif.
Une bonne colère est une colère constructive, évolutive, transformatrice de la situation et de la relation à l’autre. Pour atteindre ces objectifs positifs, elle doit s’exprimer en son nom propre, dire “je”.
Une colère non violente est une colère affirmative : j’indique que je prends ma place et que je mets des limites entre ce qui est tolérable et ce qui ne l’est pas. On est alors clair avec l’autre, mais aussi avec soi. On est vrai…
La clarté en soi : pouvoir se centrer et écouter ses besoins
S’écouter de manière productive, c’est entamer un dialogue avec soi. Répondre à la question : comment ça va ? Faire un petit bilan des besoins qui sont comblés et de ceux qui ne le sont pas. Un sorte d’état des lieux qui indique où l’on en est. Parfois, il ne sera pas possible de satisfaire dans l’immédiat certains besoins, mais le simple fait d’en prendre conscience, de les écouter permet de faire redescendre la tension intérieure. “J’aurai bien besoin d’un bon bain chaud ou d’une séance relaxation ou de yoga pour me détendre…”. Par manque de temps on remet à plus tard, mais le simple fait d’avoir identifier ses besoins, d’avoir créer des images mentales de détente permet de ressentir déjà un bienfait.
Il en va de même dans la relation à l’autre, conjoint, enfants, collègues, patron, amis, parents, on ne laisse pas s’accumuler les non-dits, les désaccords qui pourraient provoquer une explosion/implosion. La CNV est un des outils qui peut aider la femme yoyo à voir plus clair en elle, être vraie et authentique. A être enfin en paix avec elle-même et avec les autres…